Autoproduire
Do It Yourself
Le terme DIY, “Do It Yourself”, - littéralement “Fais-le toi-même” - date du mouvement punk des années 70. C'est le système D, la débrouille, le bricolage, l'entr'aide... Ces formes de création et de production existaient depuis toujours, mais ils prennent avec les punks une visée résolument anti-consumériste. L'idée est de ne plus avoir besoin d'acheter des produits, ni de se soumettre au salariat pour les fabriquer.
La musique punk en elle-même, par sa simplicité, sa non-technicité, et le peu de budget nécessaire à la formation d'un groupe, est ouverte à un grand nombre de personnes. Les seuls pré-requis sont la hargne contre le système et un minimum de débrouille. Les concerts se jouent dans des sous-sols, et les disques auto-produits, distribués en-dehors des circuits commerciaux jugés trop "standardisants". Petit à petit, c'est toute une éthique qui se construit, et qui s'applique également dans la vie quotidienne: auto-réparation des vêtements, culture de jardins potagers, cuisine, récup', recyclage...
Plus largement, on peut dire qu'il s'agit d'une mise en pratique concrète de valeurs anti-capitalistes et écologiques, par le refus du consumérisme, et la réappropriation d'un certain nombre de savoirs et de savoir-faires, abandonnés par l'aliénation moderne. En apprenant à nous éduquer et nous débrouiller par nous-mêmes, nous quittons nos rôles d'exécutants, de consommateurs et de spectateurs. Nous nous cultivons et échangeons nos connaissances, le site Wikipedia étant un exemple intéressant de ce phénomène, et plus généralement les logiciels libres.
Lors de cet apprentissage, nous disposerons à coup sûr de moyens réduits. Mais cette faiblesse des moyens peut être source de créativité. Combien de jeunes musiciens aisés ne trouvent jamais l'inspiration, obnubilés qu'ils sont par leurs joujous technologiques? Le musicien modeste, qui ne possède qu'une guitare sèche, sera épargné des distractions et jouira d'un contact plus direct avec la musique. Les difficultés qu'il endurera sauront aussi lui donner des choses à raconter, et ressentir des émotions qu'il sera poussé à retransmettre du mieux qu'il peut.
Le DIY comme mode de vie
“La philosophie DIY n'est pas seulement valable pour le secteur artistique, et ses applications concernent tous les niveaux de la vie. Par exemple, dans la mesure du possible :
- Remplacer un travail salarié par sa propre activité socialement utile.
- Créer son activité politique si ses idées ne sont pas ou peu représentées.
- Manger sur mesure et moins cher, plutôt que d'acheter des plats tout prêt fait hors de prix, dont on ne sait rien du contenu et de la fabrication.
- Faire du sport plutôt qu'en être (télé)spectateur.
- Pour les fumeurs, cultiver son propre cannabis plutôt que d'acheter à prix fort du shit souvent coupé qui engraisse la mafia et certaines dictatures.
- Bricoler, faire de la récupération, pour éviter le gaspillage, la pollution, pour boycotter la consommation et les marques, pour faire des économies...
Bref, devenir acteur de sa vie au lieu de la subir. Dans tous les cas, la démarche est beaucoup plus intéressante, on apprend, on expérimente, on comprend, on rencontre... le bénéfice humain est considérable. On évite l'ennui et la morosité tellement répandus dans notre société.
Proche de la pensée situationniste et anarchiste, la philosophie du DIY repose sur une construction des situations en dehors du carcan capitaliste, une révolution du quotidien où la subversion est autant dans la démarche que dans la réalisation finale.
DIY ne veut pas forcément dire "fais-le tout seul", au contraire, c'est même un synonyme d'autogestion. Quand la réalisation est collective le sentiment d'accomplissement est encore plus fort car en dehors de l'objectif, l'intérêt est encore dans la manière dont le projet a été réalisé. S'organiser sans structure hiérarchique, avec les avantages et les inconvénients que cela implique, ne s'apprend ni à l'école ni en entreprise.” 1
Autonomie et solidarité 2
“Selon le discours officiel, en travaillant plus, on pourrait gagner plus. Une illusion entretenue par des politiques démagogues dans un pays où la quantité et la qualité du travail salarié diminuent et où la production de richesses est confisquée par une élite 3.
Une élite qui a besoin que l'on croie à cette nécessité de travailler plus... pour qu'elle puisse continuer, elle, à gagner plus.
S'il faut bien sûr dénoncer cette situation, plutôt que d'attendre un hypothétique grand soir, de nombreux réseaux ont commencé à développer des alternatives pour devenir plus autonomes et donc moins dépendants d'un travail salarié : cela passe par les AMAP 4, les SEL 5, les groupes de décroissance 6, les groupes de santé, les jardins partagés, les ateliers vélos, les rencontres conviviales, l'hébergement solidaire 7, des ateliers cuisines, des ateliers bricolage, des outilthèques... Ces expérimentations sont généralement lancées par une mouvance à la recherche d'une simplicité volontaire, d'une certaine “pauvreté” choisie. A côté de cela, il y a ceux pour qui la pauvreté, la misère, l'exclusion sociale sont subies. Le Programme autoproduction et développement social (PADES) [...] développe depuis des années des outils pour utiliser ces démarches d'autonomisation comme mode de solidarité avec les plus démunis. Parce que l'écologie ne peut se faire sans son volet social, nous vous invitons à découvrir la richesse de ces initiatives.”
Pour aller plus loin
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Sur le net
- Manifeste pour la grève générale de la consommation: casseursdepub.org
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Texte
- Une vie sans achat?: les-renseignements-genereux.org
- 1. a. b. DIY - Fais-le toi-même, www.subsociety.org
- 2. Editorial de la revue Silence n°360, “Autoproduire pour se reconstruire”, septembre 2008.
- 3. En 2007, la rémunération des patrons des 40 entreprises côtés au CAC 40 a augmenté de 58%. L'Expansion, 27 mai 2008.
- 4. Association pour le maintien d'une agriculture paysanne, voir dossier dans Silence n° 357.
- 5. Systèmes d'échanges locaux, www.selidaire.org.
- 6. voir www.decroissance.info
- 7. voir dossier dans Silence n° 293